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Nord-Kivu: les plastiques menacent le lac malgré le moratoire
Le lac Kivu est plus que jamais menacé par le sachet plastique, malgré le moratoire accordé par le général Peter Chirimwami, gouverneur militaire, le 19 juin 2024. Les opérateurs économiques de cette partie de la république ont bénéficié d’un délai de trente jours c’est-à-dire jusque fin juillet 2024 pour écouler le stock d’emballage non biodégradables et les remplacer par les emballages dégradables.
Il a été décidé qu’après l’expiration du moratoire, toute importation, commercialisation ou utilisation des sacs, sachets, films et autres emballages en plastique dans la ville de Goma sera désormais interdite. Sur terrain, la situation semble être toute autre. Au port de Goma dès les petites heures de la matinée, plusieurs passagers débarquent des bateaux avec des bouteilles de jus en plastique et divers produits dans les sachets plastiques sans être interpellés par qui que ce soit. Certains vident le contenu de leurs bouteilles sur place et les jettent à même le sol ou dans le lac, alors d’autres prennent place à bord des moto-taxis ou de véhicules pour les balancer sur les avenues de la ville touristique où s’entassent des décharges qui attendent leur évacuation.
Approchée par nos limiers avant son embarquement dans le bateau Emmanuel II en partance pour Bukavu avec sa bouteille de jus Afia en mains, Mme Victorine Dimueshe explique : « Je préfère jeter cette bouteille plastique au bord du lac et non au milieu…parce qu’elle pourra être ramassée à d’autres fins », déclare-t-elle, sans se douter du risque de pollution. Ils sont plusieurs dizaines de passagers des bateaux qui balancent des bouteilles aux abords du lac avant le départ de bateau sans être interpellés par des services de la Mairie ou de la migration complètement préoccupés par la collecte des taxes auprès des voyageurs.
Manque de suivi
Peu après la publication du moratoire des autorités de l’état de siège, M. Faustin Nyebone, directeur exécutif de l’organisation non-gouvernementale « Appui aux initiatives communautaires de conservation de l’environnement et de développement durable (AICED) », avait exigé des mesures d’accompagnement plus draconiennes pour amener la population à prendre conscience de l’impact négatif des déchets plastiques sur l’environnement. Le gouvernorat devait rendre disponible des emballages biodégradables et faire la promotion des unités de production pour obtenir une baisse du prix, et ces mesures allaient favoriser la diminution des déchets plastiques et protéger l’environnement ainsi que l’écosystème.
Il faut aussi rappeler que l’épineuse question de gestion des déchets a déjà fait même l’objet d’une étude enrichissante à l’Université de Goma (Unigom) en juillet 2023 intitulée « Quantification, qualification et gestion des déchets ménagers dans la ville de Goma, cas du quartier Himbi ». Les étudiants Vitekere, Munandi, Shabani ont constaté que l’absence d’une gestion durable de ces déchets constitue un sérieux problème pour l’environnement et pour la santé des gomatraciens. Après une enquête auprès de 66 ménages, ils ont abouti au résultat selon lequel les déchets non biodégradables sont de l’ordre de 44% au seul quartier Himbi dont 14% des déchets plastiques, 4% des déchets papiers-cartons, 8% des déchets des verres et métaux. Les modes de gestion des déchets appliqués au sein des ménages sont anarchiques et constituent les principales causes de l’insalubrité qui entraînent des dangers environnementaux et sanitaires. Ces chercheurs pensent que la valorisation ou recyclage des déchets constitue la principale solution pour préserver l’environnement.
Le lac Kivu est plus qu’en danger. Plusieurs bouteilles en plastique jonchent le lac sans que cela ne puisse émouvoir ni les autorités du Nord et Sud Kivu ni les opérateurs économiques qui exploitent jour et nuit ce lac. Dossier à suivre. Kabongo M.